TEXTE DE LA COMMISSAIRE

Eve Tagny et My-Van Dam explorent toutes deux divers médiums artistiques, allant de la photographie à l'installation, en passant par la performance et la vidéo. Tagny accorde une attention particulière aux lieux, créant des périmètres délimités pour chaque œuvre ou installation, conçues de manière in situ, les rendant uniques et spécifiques à leur lieu de production. De son côté, Dam, issue d'un parcours sculptural, explore les processus de guérison, la mémoire et les traumas intergénérationnels. Bien que le corps ait toujours été central dans sa pratique, son nouveau corpus d'œuvres met l'accent sur le potentiel de guérison du geste. 

Eve Tagny met en lumière les délimitations physiques et inconscientes entre le corps et l'espace. Travaillant avec des espaces naturels ainsi que des espaces publics et privés, elle invite plusieurs interprètes racisé·es à naviguer ces lieux par le geste. Souvent présente dans ses œuvres, elle occupe ces lieux avec les interprètes en faisant preuve de soutien et de conscience de l'autre. Bien que son corps et ceux des interprètes semblent centraux dans les œuvres en présentiel, le public joue également un rôle crucial dans la compréhension des espaces délimités et des normes qui y sont associées. Pour cette édition, une image tirée de l'œuvre Assemblies a été choisie. Cette performance de 12 heures, présentée à Toronto près de l'Hôtel de Ville, met en scène Tagny et sept autres interprètes se partageant un espace ressemblant à un amphithéâtre. Chacun·e circule en portant des sacs de terre et en soutenant le travail des autres. 

My-Van Dam aborde de façon intime le potentiel de guérison du geste. Inspirée par la théorie du Body-Mind Centering de Bonnie Bainbridge Cohen, elle réfléchit au pouvoir des pratiques somatiques. L'œuvre choisie, Coregulation (1), présente deux interprètes, toutes deux praticiennes somatiques, qui explorent le pouvoir du corps et du geste dans les processus de guérison. Sans tomber dans une représentation explicitement politique ou abrupte du corps, Dam crée des espaces de recueillement quasi-rituels de guérison, partagés collectivement et individuellement par les praticiennes. Ces moments sont toujours vécus par des femmes racisées (PANDC / BIPOC). Bien que les thèmes de la guérison, de la mémoire et des traumas intergénérationnels aient toujours été présents dans ses installations, ce nouveau corpus lui permet d'allier sa pratique de la danse et de la mémoire du corps. 

À travers leurs approches distinctes mais complémentaires, Eve Tagny et My-Van Damredéfinissent les frontières entre le corps, l'espace et la mémoire. Tagny, en explorant lesinteractions entre les corps et les lieux, et Dam, en examinant le potentiel de guérison desgestes, offrent des perspectives uniques sur les relations humaines et les expériences partagées. Leur travail, tout en étant profondément personnel, touche à des enjeux universelsde résilience, de soutien mutuel, et de transformation.

BIBLIOGRAPHIE

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